Cyclisme Tour de France

La 100e du Tour : des lieux et des histoires (1/10)

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À l’occasion de la centième édition du Tour de France et de son parcours géographiquement majestueux, Culture Sport décompte les jours précédant le départ corse par une rétrospective des événements  anecdotes et drames qui ont marqué l’histoire de la grande messe juillettiste et ses lieux mythiques. L’honneur revient au Tourmalet d’inaugurer ces deux semaines d’archives.

Le Tourmalet : une dynamite

C’est l’un des grands absents du Tour de France. Le Tourmalet, l’un des cols les plus souvent escaladé par le Tour, ne verra pas la caravane fouler son tarmac. Est-ce la lassitude du peloton qui a convaincu la direction de l’omettre ? L’an dernier, les cuisses imposantes de Mark Cavendish franchissaient le sommet en compagnie des meilleurs grimpeurs. Un affront à ce monument du sport. Car un siècle auparavant, les forçats de la route franchissaient l’infranchissable à la sueur de leur front, parfois au risque de leur vie. « Vous êtes tous des criminels » fustigeait Octave Lapize en 1910. Lequel escaladât le col pyrénéen en alternant marche à pied et vélo. Il basculât en tête, suivi par Gustave Garigou. Celui-ci fût le premier à réaliser l’ascension entière sur sa machine. Pour cet exploit, il reçut cent franc-or. Mais la récompense n’égale pas le courage de ces pionniers : en ce 21 juillet 1910, les coureurs, quittant Luchon, avaient déjà atteint les sommets du col de Peyresourde et d’Aspin. Mais le Tourmalet, culminant à 2114 mètres à l’époque (aujourd’hui, il s’élève un mètre plus haut) constituait un véritable obstacle. Sa route en piteux état, l’altitude et les cent-cinquante bornes restantes pour rallier Bayonne relevaient d’une inconsciente chevauchée à travers le massif. L’idée est venue d’un journaliste avide de spectacle : Alphonse Steines. Celui-ci, parti en reconnaissance un mois plus tôt, gardât un souvenir mitigé de sa rencontre avec le monstre pyrénéen : piégé par une tempête de neige, il fût retrouvé à moitié congelé. Mais l’aventure ne l’eut pas… refroidi ! Il fût décidé à y faire passer le Tour de France. Steines comptait dynamiter la course. Il a réussi. Sur une route destinée aux bergers, au beau milieu de nulle part, l’événement cycliste a pris une autre dimension. Au fil du temps, les conditions s’y sont améliorées : la mécanique rend l’ascension plus confortable et le revêtement en bitume a effacé les pierres d’avant-guerre.

Eugène Christophe, le « Vieux Gaulois »

C’était il y a cent ans. Deux ans après la trouvaille d’Alphonse Steines, revoici – pour la troisième fois consécutive – le Tourmalet. En tête, c’est le Belge Philippe Thys qui mène la cadence. Derrière lui, un cycliste aux longues moustaches s’accroche. Son style caractéristique lui vaudra le surnom du « Vieux Gaulois ». Il s’agit d’Eugène Christophe. Pensant avoir fait le plus dur en franchissant le sommet du monstre pyrénéen, le Français chute en percutant une voiture dans la descente. Fort heureusement, il n’a que de légères contusions. Par contre, sa bicyclette est en fâcheux état : sa fourche est brisée. Christophe – alors au contact de Thys – doit se résigner à descendre le versant est à pied, vélo sur le dos. C’est à Sainte-Marie de Campan, premier village sur sa route, qu’il s’arrête. Il se rend chez un forgeron. Le règlement interdisant toute assistance, le cycliste se reconverti, l’espace d’une réparation, en mécanicien. Sous l’œil de deux commissaires, il remonte sur sa machine et part à la conquête des cols d’Aspin et de Peyresourde. Il termine à trois heures et cinquante minutes du vainqueur Thys. Lequel remportera le Tour la même année, tandis que le « Vieux Gaulois » échouera septième. Six ans plus tard, Eugène Christophe aura l’honneur de porter le premier maillot jaune. Mais une fois encore, il perdra toutes illusions dans les mêmes circonstances, à deux jours de l’arrivée. Jamais vainqueur final, Christophe aura toutefois forgé la légende…

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