Malgré des sollicitations provenant de toutes parts, Christian Prudhomme est toujours très disponible pour les interviews. En marge de l’inauguration de la place des Géants du Tour à Pau, “un musée à ciel ouvert”, nous avons abordé de nombreux sujets, en compagnie du directeur du Tour de France, à commencer par cette initiative mise en place et imaginée par François Bayrou. Nous sommes également revenus sur la candidature de la cité Paloise pour un éventuel Grand Départ de la Grande Boucle et sur une première semaine de course complètement folle, qui a notamment vu deux Maillots Jaunes abandonner sur chute (Fabian Cancellara et Tony Martin). Christian Prudhomme a également eu une pensée pour Ivan Basso.

Culture Sport : Monsieur Prudhomme, nous sommes actuellement dans un magnifique écrin, c’est une satisfaction d’avoir pu concrétiser ce projet avec le maire de Pau, François Bayrou ?
Christian Prudhomme : C’est une très belle idée et une superbe réalisation. C’est un musée à ciel ouvert, ça tombe sous le sens même si jamais personne n’y avait pensé auparavant. Le cyclisme il est dans la vie, les exploits sont faits dans la montagne, à proximité de la mer, à ciel ouvert, pas dans un gymnase ou dans un stade. Que ce musée, ces totems, ces géants-là soient dehors, à l’air pur, à l’air libre, c’est bien, presque naturel. Ce que j’apprécie c’est l’idée d’un musée en mouvement : il y a des champions du passé, des champions d’aujourd’hui et il y aura aussi les champions de demain, puisqu’on ajoutera les totems des vainqueurs de 2015, 2020, 2050, etc. Je trouve ça très bien. J’aime également beaucoup ce que cela représente : l’Histoire de la course mais aussi parfois l’Histoire de la France, du monde qui bouge. (Il nous montre en même temps les photos placardées sur le totem de Greg Lemond, celui de 1990). On retrouve des photos en couleurs, en noir et blanc, l’évolution de la manière dont les gens sont habillés sur le bord des routes… C’est la vie de notre pays qui est représentée à travers de l’Histoire du Tour de France.
Pau est candidate, on le sait. Nous recevons 250 candidatures par an.
Culture Sport : La première adjointe au maire de Pau a déclaré, dans la République des Pyrénées, vouloir recevoir un Grand Départ du Tour ou l’ultime contre-la-montre avant Paris, est-ce dans les tuyaux ? Est-ce que tout cela réalisable déjà ?
Christian Prudhomme : (rires) Tout est réalisable ! On connaît l’enthousiasme de Josy Poueyto qui est d’ailleurs la seule ajointe de France officiellement déléguée au Tour de France, c’est absolument formidable. C’est une mission qu’elle remplie avec enthousiasme, ferveur, passion et exaltation. Pau est candidate, on le sait. Nous recevons 250 candidatures par an et beaucoup (il insiste bien sur “beaucoup” en le répétant deux autres fois) d’élus nous demandent des contre-la-montre. On verra ce qu’on peut faire. Mais ce qui est certain, c’est que si le Tour de France est déjà venu soixante-sept fois à Pau, ce n’est pas tout à fait par hasard. Il y reviendra bien évidemment.
Culture Sport : Thibaut Pinot a annoncé, dans l’Equipe, qu’il militait lui aussi pour un Grand Départ du Tour au pied des Pyrénées !
Christian Prudhomme : Vous êtes sûr ? (rires) Il ne milite pas en faveur d’un Grand Départ en Haute-Saône, chez lui ? Non, plus sérieusement, je ne sais pas du tout. Une chose est sûre, nous ne devons qu’être ravis d’avoir chez les élus en général, mais particulièrement à Pau, une telle envie du Tour de France.
On aurait plutôt inversé et mis Nibali avec 2’22’’ d’avance sur Froome et pas le contraire.
Culture Sport : Un mot sur cette édition 2015, menée par Christopher Froome. Vous avez magnifiquement tracé cette première semaine avec vos équipes. Vous êtes loin d’être déçu par les scénarios qui se sont produits !
Christophe Prudhomme : Non, du tout ! C’est une course à handicap comme nous l’avions imaginé et comme nous l’avions même rêvé. Mais ce n’est pas forcément dans le sens dans lequel nous l’avions imaginé puisque après les dix premiers jours de course, comme Christopher Froome et Vincenzo Nibali l’ont dit, on aurait plutôt inversé et mis Nibali avec 2’22’’ d’avance et pas le contraire. Ça veut dire aussi qu’ils se sont tous formidablement préparés et qu’ils ont été protégés par des équipiers très solides. Désormais, nous entrons dans la montagne. C’est un Tour où il n’y a pas plus de montagne que d’ordinaire mais où elle est plus concentrée. Nous sommes au pied de trois étapes Pyrénéennes, puis suivront les Alpes avec, auparavant, un Massif Central qui ne sera pas facile non plus. On verra ce que cela donnera ! Je pense qu’il y aura une belle bagarre notamment pour un coureur comme Nibali. Pour l’Italien, hors l’attaque, point de salut. On sait que c’est précisément dans l’attaque qu’il excelle. Il est capable d’attaquer partout et il pourra trouver des alliés de circonstance avec Alberto Contador. Et puis que va donner Nairo Quintana, sera-t-il le premier vainqueur Sud-Américain de la Grande Boucle ? Froome pourra-t-il résister et son équipe sera-t-elle à la hauteur ? Et que va faire Tejay Van Garderden ? Concernant les Français, ils seront, j’en suis convaincu, bien meilleurs en deuxième et en troisième semaine que dans la première.
Culture Sport : Pour terminer, nous avons appris une terrible nouvelle dans l’après-midi (hier). Ivan Basso a dû quitter le Tour pour soigner un cancer des testicules…
Christian Prudhomme : Je pense à lui forcément, parce que dans les communiqués médicaux il y a toujours des plaies ou des fractures de la clavicule, des choses comme ça après les chutes, mais on ne s’attend vraiment pas à ça. Il sera opéré demain (aujourd’hui) à Milan et je lui souhaite bien évidemment le plus prompt des rétablissements.
Propos recueillis par Nicolas Gréno. Merci à Christian Prudhomme pour sa disponibilité. Crédit photo : Nicolas Gréno.
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