Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Le circuit de Sakhir a offert une course diaboliquement imprévisible avec un doublé pour le moins inattendu des Flèches d’Argent et la première victoire de la saison pour Lewis Hamilton.
Le vent soufflait fort dans le désert bahreïni au moment du départ, en poupe pour Vettel. L’Allemand prend l’ascendant dès le premier virage sur son jeune coéquipier qui descend à la troisième place, Bottas s’intercalant à la deuxième position. Derrière, la seconde ligne droite se transforme en 14 juillet sous le fond plat de Lance Stroll, dont le contact avec la Haas de Grosjean cause une flopée d’étincelles. Tandis que le Français abandonne, pas le temps de souffler : dès le deuxième tour Leclerc trouve l’ouverture sur Bottas qui se rate au freinage et permet dans le même temps à Hamilton de passer. Hulkemberg signe un envol magnifique et point déjà à la onzième position après les premières boucles. Sainz et Verstappen se heurtent pour la cinquième place, incident qui ne sera pas prolongé par les commissaires malgré l’apitoiement de l’Espagnol dans sa radio qui voit le pan droit de son aileron avant s’affaisser et créer à son tour des gerbes d’étincelles et sème la pagaille au milieu des Renault et Sauber en lutte.

L’attention revient vite sur les deux Ferrari, avec le non-respect des consignes d’équipe du muret des stands par Leclerc (omises par la réalisation internationale, elles ne seront cependant révélées qu’après la course).
« Je suis plus rapide »
« Ok (Sebastian), reste derrière pendant deux tours »
C’est pourtant moins d’une minute après ce message que le Monégasque s’impose sur son coéquipier à l’extérieur du premier virage. Derrière c’est un peloton ultra compact qui se bat de chaque côté, la seule Haas restante de Magnussen tirant grise mine en ces conditions face aux Racing Point et Sauber tandis que McLaren « profite » des malheurs de Sainz, relégué en fond de grille, pour tester les options pneumatiques s’offrant à Norris, le rookie étant bien remonté avec un rythme de course lui permettant de belles passes d’armes. Les pneumatiques étaient en effet au centre de l’attention, tant les stratégies pouvaient varier d’un pilote à l’autre tout en restant viables. Ainsi Ricciardo tenta le pari de tenir ses gommes tendres jusqu’au vingt-cinquième tour, bouclant par la même occasion un tour en tête au moment de l’arrêt de Vettel, alors leader. Dans ces arrêts aux stands le classement de tête de change pas avec les Ferrari puis les Mercedes en formation tandis que plus loin les grands perdants sont Magnussen et les Williams, toujours dans un autre monde à éviter les vibreurs pour une monoplace encore lente et fragile.
Au fil des tours, Gasly remonte difficilement les places alors que Verstappen confirme le manque de vitesse ce week-end en ne parvenant pas à revenir sur les Mercedes. Elles sont reléguées à 4 et 10s des Ferrari, intouchables en rythme de course avec une performance constante qui semble assurer une fin de course relativement sereine pour la Scuderia.
Que nenni ! La deuxième salve d’arrêts marque, sans qu’ils ne le sachent encore, le début de la fin pour les rouges. Vettel ressort bien devant Hamilton mais ce dernier, les pneus médium déjà chauds d’un tour, se rapproche dangereusement et tente une manœuvre osée par l’extérieur du quatrième virage, alors sujet de nombreuses rafales de vent depuis le début de la course. Le quintuple champion n’est pas découragé et au tour 38, le Britannique se rejette au même endroit et passe la monoplace italienne pour le gain de la seconde place. De son côté, Vettel fait remonter ses vilains démons de l’année dernière (Monza 2018, Suzuka 2018) et part à la faute sans contact, supposément à cause du vent dont nous supposions déjà l’importance durant les qualifications. Le malheur de l’Allemand ne s’arrête pas ici. Les « plats » causèrent plus de vibrations que l’aileron avant ne pût supporter ! Ce dernier se désolidarise sous un énième éclat d’étincelles et oblige l’écurie à un troisième arrêt qui ne laisse espérer qu’un top cinq.

Moins de huit tours plus tard, nouveau coup de théâtre au sommet avec aucune recharge de batteries pour Leclerc, qui restreint son pied droit de 160 chevaux. Il ne peux rien faire d’autre que de voir les Mercedes d’Hamilton et de Bottas, pourtant à 8 et 30 secondes lui passer devant en moins de sept tours. Avec Max Verstappen, à moins de 6 secondes à trois tours de la fin, le Monégasque songe déjà à voir son premier podium s’envoler. Mais le sort en décide autrement avec un double abandon simultané des pilotes Renault qui fait sortir la safety car en piste ! Celle-ci bouclera les deux tours finaux, offrant, sur un plateau, un doublé aux Flèches d’Argent et un premier podium en rouge et en carrière pour Charles Leclerc, « chanceux dans sa malchance. » Au milieu de ses déboires, le Monégasque s’octroie le point du meilleur tour et est élu « pilote du jour ».
Les Renault ont manqué d’énormes points dans la lutte constructeurs et offrent à Norris ses premières unités avec McLaren avec une inespérée sixième position. Idem pour Alexander Albon avec Toro Rosso, à la neuvième place.

Nous ne pouvons désormais qu’attendre un spectacle similaire pour le millième Grand Prix en Chine, dont le circuit dispose d’une physiologie identique à Bahreïn et promet une performance toujours aussi proche avec une gestion pneumatique une nouvelle fois sujette à de nombreux rebondissements !
Guilhem Piepers
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