JEUX OLYMPIQUES. Water-polo. 2016 est l’année du retour du water-polo français aux Jeux Olympiques. Depuis 1992, l’équipe de France n’a jamais pu se qualifier pour la compétition suprême. Depuis samedi, elle essaye de montrer le meilleur d’elle-même. La défaite du premier match face au Monténégro (7-4) ne l’empêche pas de viser loin. Rémi Garsau, revient sur cette expérience fantastique. A 32 ans, le gardien de but de l’équipe de France, dix fois champion de France avec l’équipe de Marseille, vit le rêve de toute une carrière.
“Il y a des nations bien plus expérimentées que nous, on le sait, mais on va tout donner pour créer peut-être l’exploit.”
cultureSPORT : Le match face au Monténégro était compliqué parce qu’ils étaient plus forts ou parce qu’il y avait aussi la pression du premier match ?
Rémi Garsau : Les deux, ils sont quand même vice-champions d’Europe. Ils ont plus d’expérience que nous, il y en a plusieurs qui ont déjà fait les Jeux Olympiques. Nous, on est novice dans ce domaine, on est rentré dans l’eau avec la boule au ventre, et du coup il nous a fallu une mi-temps pour se faire à la piscine, à l’ambiance, à évacuer la pression et à parvenir à se lâcher.
cultureSPORT : Vous êtes menés 5-0 à la mi-temps, vous remontez 5-3 au 3ème quart-temps. Qu’est-ce qu’il se passe à ce moment-là ?
Rémi Garsau : On a changé de tactique et on s’est mis en route offensivement avec plus de rythme et plus d’agressivité. On revient bien par deux fois à deux buts, après il nous manque un peu d’expérience pour recoller à un but et espérer plus mais c’est déjà encourageant qu’on puisse revenir comme ça parce que ça aurait pu être une déroute avec 5-0 à la mi-temps. Il va falloir confirmer ça face aux Italiens et montrer qu’on n’est pas là pour faire de la figuration.
cultureSPORT : Quelle est la particularité du poste de gardien ? Est-ce que vous êtes responsable de la stratégie de défense ?
Rémi Garsau : On est une sorte de guide pour la défense. On aide les joueurs quand ils sont en train de nager et qu’ils ne voient pas ce qu’il se passe dans leur dos. On est aussi le dernier rempart, si on fait une erreur, il n’y a personne pour la rattraper. Après c’est plutôt le coach qui est responsable de la stratégie, on en a trois, chacun a son propre rôle.
cultureSPORT : Quelles sont les grosses nations représentées aux JO ?
Rémi Garsau : A part nous et le Japon, il n’y a que des grosses nations. Sur 12 équipes, 8 sont européennes avec tous les champions d’Europe et du monde. Les favoris sont les Serbes même s’ils ont fait match nul pour leur premier match, ils sont quand même champions du monde et champions d’Europe en titre. Après ce sont les Jeux Olympiques, c’est quelque chose de particulier, on n’est jamais à l’abri d’un faux pas mais à mon avis il y aura toujours les Croates, les Hongrois, les Grecs qui sont en forme ces dernières années. Les Etats-Unis ne font pas beaucoup de matchs avec les Européens mais ils auront, je pense, leur mot à dire. Il y aura de toute façon de grosses surprises.
cultureSPORT : Votre entraîneur a fait un discours avant votre premier match très touchant sur le bord de la piscine, qu’est-ce que vous en avez retenu ?
Rémi Garsau : On a découvert l’ambiance olympique, le village, c’était un émerveillement pour nous tous. Il nous a donc dit qu’il ne fallait pas se laisser déconcentrer par ça, qu’il ne fallait pas passer à côté des Jeux. Parce que même si on est heureux en dehors, il y a malgré tout une compétition à jouer. Il ne faut surtout pas qu’on ait de regret ensuite en se disant qu’on a profité du village mais pas des matchs.
cultureSPORT : Le water-polo n’a pas été représenté par la France depuis 1992 aux Jeux Olympiques, vous avez la pression ou au contraire vous profitez pleinement de la chance que vous avez d’être aux Jeux ?
Rémi Garsau : On n’a pas de pression de résultat, on a juste la pression de bien figurer. On n’est pas là en vacances, on s’est entraînés tous les jours pour aller aux Jeux. Notre objectif est atteint, maintenant on ne veut pas s’arrêter là. On a envie d’un peu plus et pourquoi pas créer un exploit. On est outsider donc la seule pression qu’on a c’est de tout donner et de ne rien regretter en sortant des matchs. Notre objectif c’est les quarts de finale mais si on n’y arrive pas ce ne sera pas un échec. Ce sont nos premiers Jeux Olympiques et en plus on est dans le groupe de la mort. Il y a des nations bien plus expérimentées que nous, on le sait.
cultureSPORT : Le water-polo est un sport peu connu en France. Comment vous gérez votre médiatisation soudaine ?
Rémi Garsau : Comme on peut (rires). On essaye de répondre aux interviews au maximum. C’est difficile avec les réseaux sociaux et tout l’engouement qu’il y a autour des Jeux Olympiques. Il y en a qui le gèrent à leur manière, certains sont à fond dedans, d’autres moins. J’espère juste qu’on ne va pas trop s’éparpiller.
cultureSPORT : Vous pensez créer un engouement ? Qu’avec votre équipe vous pouvez peut-être donner envie aux jeunes par exemple de s’intéresser davantage au water-polo ?
Rémi Garsau : On l’espère ! On a vu l’engouement qu’il y a eu après la qualification olympique déjà. On a beaucoup de messages d’encouragement, de partage sur les réseaux sociaux. A nous de bien figurer pour donner encore plus envie aux jeunes, qui ne font pas de polo ou qui commencent, d’aller plus loin et de permettre dans les années futures d’avoir plus de joueurs. Plus on a joueurs, plus de bons joueurs peuvent sortir de la masse. C’est ce qu’il se passe dans les pays de l’Est, ils ont tellement de joueurs que c’est facile de sortir des lumières, alors que nous dans beaucoup de clubs, l’équipe est faite par défaut. Souvent il y a tout juste assez de jeunes pour faire une équipe. Il n’y a donc pas de mise en concurrence, c’est ce qui pêche beaucoup après par la suite.
cultureSPORT : Qu’est-ce que cela représente pour vous les Jeux Olympiques ?
Rémi Garsau : C’est le rêve de toute une carrière à 32 ans. Dans l’équipe, certains ont 22 ans et ils font déjà les JO, donc je ne sais pas comment ça va être pour eux par la suite mais pour les plus vieux – la majeure partie de l’équipe – c’est extraordinaire. On a vécu beaucoup de désillusion, des qualifications qui ne passent pas et qui se jouent à pas grand-chose, et puis tout d’un coup on touche au but et on réalise ce pour quoi on s’entraîne tous les jours. On espère donner envie aux générations futures comme les générations de 88 et 92 nous ont donné envie.
cultureSPORT : Est-ce que vous pensez aux prochains Jeux Olympiques ? Et notamment peut-être à Paris 2024, est-ce que vous pensez que la France a ses chances d’organiser les JO ?
Rémi Garsau : On y pensait avant de se qualifier, on se disait que si on ne se qualifie pas à ceux-là, on pousserait un peu plus, jusqu’à être qualifiés d’office à Paris. Mais maintenant qu’on y est, on n’y pense pas vraiment. C’est la fin d’un cycle donc on profite au maximum des derniers jours qui restent, parce qu’on ne sait pas ce qu’il va se passer par la suite, si le coach va changer, si des joueurs vont arrêter. Donc quoiqu’il arrive après cet été rien ne sera plus comme avant. On profite un maximum et on verra par la suite. Pour Paris 2024, je pense que la France a ses chances, on n’est pas passé très loin déjà en 2012. Les Jeux vont forcément revenir en Europe à un moment donné. C’est ce que tous les sportifs français souhaitent.
Son programme
Aujourd’hui (à 15h20) : Italie-France. La suite : France-États-Unis (10 août), Espagne-France (12 août), France-Croatie (14 août), quarts de finale (16 août), demi-finales (18 août), match pour la 3e place et finale (20 août).
Propos recueillis par Eline Erzilbengoa (@elineerzil – e.erzilbengoa@culturesport.net)
Crédits photos : AFP/Attila Kisbenedek, site officiel du Cercle des nageurs de Marseille
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