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Sandra Dimbour : « Je regrette de ne pas avoir été performante aux JO »

Elle restera comme l’une des meilleures joueuses de badminton de l’Histoire, en France. Sandra Dimbour, qui a participé à trois éditions des Jeux Olympiques revient, pour Culture Sport, sur sa belle carrière, mais aussi sur les derniers Internationaux de France et le niveau actuel du bad’ tricolore. Cet entretien était aussi pour nous l’occasion de parler, en sa compagnie, des JO 2024 mais aussi de l’évolution du sport féminin. Sandra Dimbour inaugure d’ailleurs une nouvelle rubrique hebdo : « Fémin’Sport ».

Vendredi prochain dans Fémin’Sport : du hand, du rugby, peut-être les deux ? Surprise…

Culture Sport Sandra Dimbour

Sa carrière

L’entrée du badminton aux JO de Barcelone 1992 a été un coup de boost incroyable pour ma discipline.

Culture Sport : Que retenez-vous de votre carrière ?

Sandra Dimbour : Beaucoup de joies et de plaisirs d’avoir eu la chance de jouer au badminton à haut niveau, de gagner des titres et de vivre des expériences fabuleuses comme représenter la France aux JO, aux championnats du monde et d’Europe, de jouer pour l’équipe de France…

Ce n’est pas donné à tout le monde et, pour ça, je ne serai jamais assez reconnaissante à toutes les personnes qui m’ont encadrée et accompagnée tout au long de ma formation et de ma carrière. Sans l’engagement de toutes ses personnes, rien n’aurait pu se faire.
Les premières sont évidemment ma famille et mes entraîneurs. Mais je n’oublie pas mes partenaires d’entraînement et d’équipe de France qui à travers l’entraide et la concurrence m’ont fait progresser ; les aides apportées par les structures qui faisaient le sport hier et qu’ils le font encore bien fonctionner aujourd’hui (clubs, INSEP…). Toutes ces aides ont été amplifiées par l’entrée du badminton aux JO de Barcelone. Un coup de boost incroyable pour ma discipline.

Rien ne peut se faire seul et en revoyant le fil de ma carrière, je me dis souvent que j’ai rencontré les bonnes personnes au bon moment, que j’ai eu la chance d’être régulièrement au bon endroit avec des choix de club cohérents quand j’étais jeune et l’entrée du badminton à l’INSEP en 1989.

Que rêver de mieux quand on est jeune de vivre une telle passion, de bénéficier de ce qu’il se fait de mieux dans le sport et d’être accompagnée sur le plan sportif, mais aussi sur le plan socio professionnel. Le sport m’a beaucoup apporté et les compétences acquises tout au long de ma carrière me servent toujours aujourd’hui dans ma profession, mais aussi dans tous les domaines de ma vie.

Culture Sport : Pour vous, quel a été le sommet de votre carrière ?

Sandra Dimbour : Je ne parlerai pas de sommet de carrière, mais il est vrai que mes meilleures années sont sur la fin de ma carrière entre les JO d’Atlanta (1996) et de Sydney (2000). C’est la période où j’ai l’impression d’avoir le mieux joué et d’avoir été la plus solide mentalement et tactiquement. C’est d’ailleurs la période où mon classement mondial a été le meilleur puisque je suis passée de la 60ème à la 20ème place mondiale et j’ai remporté le circuit européen sur cette période. J’ai vécu quelques moments incroyables avec des victoires sur le tournoi international de Toulouse ou les internationaux d’Australie lors du test olympique à Sydney. La victoire aux championnats d’Europe B par équipe à Strasbourg et la médaille de bronze à la coupe d’Europe des clubs avec l’IMBC restent des expériences géniales. J’en oublie certainement…

Culture Sport Sandra Dimbour équipe de France 1997
Sandra Dimbour (assise à l’extrême gauche) avec l’équipe de France de badminton en 1997.
Culture Sport : Vous êtes la seule badiste à avoir participé à trois Jeux Olympiques de suite. Etes-vous fière de cette longévité au plus haut niveau ?

Sandra Dimbour : Je suis très fière de ce que j’ai pu accomplir tout au long de ma carrière et en particulier de m’être qualifiée pour trois JO de suite. Je regrette toutefois de ne pas avoir y avoir été performante. La longévité n’a été possible que grâce à une forte motivation et à un corps qui a bien supporté les efforts tout au long de ma carrière. Et cela, je le dois avant tout à la qualité des entraînements et de l’accompagnement qui m’ont permis de m’en sortir également dans les moments difficiles. J’ai bien failli arrêter après les jeux d’Atlanta pour différentes raisons. L’encadrement de l’INSEP et celui de la fédération m’ont énormément apporté à ce moment-là pour que je poursuive ma carrière à haut niveau et je ne le regrette pas.

Culture Sport : Quelle est votre actualité aujourd’hui ? Comment gérez-vous votre après carrière ?

Sandra Dimbour : Mon actualité aujourd’hui est plus familiale qu’autre chose. Depuis la naissance de ma fille en 2009, je me consacre plus à son éducation et à ma vie familiale. Je travaille toujours dans le domaine du sport puisqu’après quelques années dans l’encadrement des équipes de France, j’ai décidé de travailler au CREPS d’Île de France (Châtenay-Malabry) où j’accompagne les sportifs de haut niveau des pôles sportifs sur le plan scolaire. En clair, je m’assure des aménagements d’emploi du temps et j’accompagne les sportifs lycéens jusqu’à l’obtention du BAC. Cela me permet de voir autre chose que du badminton et de m’ouvrir à d’autres univers aussi bien sportifs que professionnels.

Le badminton actuel

Je crois que le badminton Français progresse encore.

Culture Sport : Un petit mot sur les derniers Internationaux de France. Quels sont les principaux enseignements que vous retenez ?

Sandra Dimbour : Je n’ai pas vu grand-chose des derniers Internationaux de France et je me sens tellement loin du badminton de haut niveau que je ne suis pas sûre d’être très objective quand on parle d’enseignements à retirer de cette compétition. Ce que je vois, mais ce n’est pas grand-chose, c’est une hégémonie chinoise moins prégnante qu’en 2008 et 2010. Il me semble que plus de joueurs sont capables de gagner des grands tournois. Les Indiens viennent par exemple de remporter le simple dames et le simple hommes de l’Open de Chine aujourd’hui (dimanche dernier, le 16 novembre, ndlr).

Culture Sport : Quel est le niveau du badminton tricolore actuellement ?

Sandra Dimbour : Je crois qu’il progresse encore. Les garçons me semblent capables de rivaliser avec les meilleurs mondiaux en particulier Brice Leverdez ces derniers mois. Les filles ne sont pas en reste, mais ont encore besoin de confirmer. Elles sont encore jeunes et montrent de belles choses aussi bien en simple qu’en double. Il y aura certainement de très grands résultats dans les années qui viennent. Les joueurs qui composent l’équipe de France aujourd’hui ont eu les meilleurs résultats internationaux en jeunes que l’on n’a jamais eus.

Culture Sport : Comment les Français(e)s peuvent-ils/elles rivaliser avec les meilleur(e)s badistes de la planète ?

Sandra Dimbour : Ils ont déjà tout ce qu’il faut pour progresser : de bons entraîneurs et des structures de qualité. L’expérience et la confiance devraient faire le reste à l’avenir. Les récentes victoires à l’international, aussi bien en individuel qu’en par équipes, montrent qu’ils sont capables de belles choses. Les joueurs commencent à en prendre conscience. C’est une question de temps.

Le sport féminin

Il faudra du temps pour faire évoluer les mentalités.

Culture Sport : Quelles peuvent être, selon vous, les principaux points d’améliorations dans la médiatisation du sport féminin ?

Sandra Dimbour : C’est encore un grand chantier même si on voit un peu plus de sport féminin à la télévision. Néanmoins, quand je regarde la télévision où quand je lis L’Equipe, le sport médiatisé est encore trop masculin à mon goût. Les « grands événements » médiatisés, par lesdites grandes chaînes, sont très masculins. Quelques actions sont menées ces dernières années auprès des médias pour mettre en avant le sport féminin. Les résultats sont encourageants, mais il reste encore beaucoup à faire. Les médias parleraient peut-être plus de sport féminin s’il y avait plus de femmes dans les instances dirigeantes, plus de femmes entraîneurs, plus de femmes pratiquant en compétition… Le travail de fond doit donc également se faire dans toutes les strates du sport et de la société française.

Culture Sport : Etes-vous optimiste quant à son évolution ?

Sandra Dimbour : Il faut l’être, sinon autant tout arrêter. Je sais toutefois qu’il faudra du temps pour faire évoluer les mentalités.

Culture Sport : D’après vous, les femmes sont-elles de plus en plus mises en valeur ?

Sandra Dimbour : J’ai l’impression qu’elles le sont plus aujourd’hui qu’avant, mais il reste beaucoup de travail pour avoir la même exposition que les hommes dans beaucoup de domaines.

Paris 2024

Les JO 2024 en France pourraient apporter un peu de lumière aux futures générations de sportifs.

Culture Sport : Pensez-vous que nous avons une chance d’organiser les Jeux dans 10 ans, si le CNOSF dépose le dossier au CIO ?

Sandra Dimbour : Je le pense et je l’espère. La France à beaucoup d’atouts à faire valoir et elle y gagnerait sur beaucoup de plans à présenter une candidature. Organiser les JO coûte peut-être cher, mais ça apporte une telle dynamique aussi bien économique, structurelle que sportive. Ce serait une opportunité incroyable. La candidature doit être bien pensée et portée par toutes les autorités du pays d’où les études d’opportunités en cours. Mais j’espère que la France va se lancer et que l’ensemble de la population française soutiendra cette candidature. Pour sortir de la conjoncture actuelle, il va falloir une bonne dose d’ambitions, d’audaces et d’idées. La candidature et l’éventuelle organisation des JO en 2024 pourraient apporter un peu de lumière aux futures générations de sportifs.

Fiche d’identité

Née le 13 juin 1970 à Saint-Denis (93)

Palmarès

Culture Sport Sandra Dimbour 2000Jeux Olympiques d’été : Participations aux Jeux de Barcelone 92, Atlanta 96 et Sydney 2000.

Championnats du monde : Participations aux Mondiaux 1989, 1991, 1993, 1995, 1997 et 1999. Meilleur résultat : 17e en simple dames à Birmingham 1993.

Championnats d’Europe : Participations aux championnats d’Europe 1990, 1994 et 1998. Meilleur résultat : 12e par équipes à Sofia 1998.

Championnats de France : 7 fois championne de France en simple dames et 5 fois en double dames (1989-1999).

Source : France Olympique

Propos recueillis par Nicolas Gréno. Merci à Sandra Dimbour pour sa collaboration. Crédits photos : Twitter de Sandra Dimbour, DR.

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